Trail de la Cité de Pierres, par Jérôme

Un routard chez les traileurs, par Jérôme F.

Trail de la Cité de Pierres

Championnats de France de Trail Court 2023

 

Hummm, ça sent bon le bitume. Que j’aime ces routes rectilignes en pleine zone industrielle, ces paysages de bâtiments bétonnés, cet air pollué qui encrasse mes poumons, ces particules de plastique qui viennent insidieusement s’immiscer dans mon sang, cette sensation d’être « oxy » après 2 kilomètres de course, ces allures à respecter, ces allures ratées…

Vous l’aurez remarqué, je suis un routard. J’ai arpenté les 10kms les plus pittoresques de la région depuis plus d’une décennie maintenant et je ne m’en lasse toujours pas. Néanmoins, quand la communauté des Traileurs m’évoque l’idée de partir découvrir leur terrain de jeu lors des Championnats de France, je saisis l’opportunité. La nature, les paysages sauvages, les sentiers (« single » pour les initiés), les TUC…j’ai envie d’y goûter. Bon surtout les TUC, je reconnais.

Rendez-vous est pris le samedi 18 mars pour le Trail Court de 31km et 1600 mètres de dénivelé positif dans le Parc Naturel des Grands Causses. Le Trail de la Cité de Pierres sert de support aux Championnats. Des pierres, c’est toujours mieux que du bitume non ?

Après une descente en voiture sans accroc avec mes acolytes Lizzie, Nicolas et Franck, nous arrivons à Millau où nous retrouvons le reste de l’équipe. Au total, nous serons 15 athlètes des Foulées à porter le maillot lors de ces Championnats. Avant de récupérer nos dossards, et pour décompresser d’un long voyage, nous passons au bar prendre un petit rafraîchissement. Je m’étais promis de ne pas boire d’alcool avant la course….Premier faux-pas ! Je me rassure en me disant que c’est bon pour le moral. Et je ne suis pas le seul du groupe, ce ne doit pas être si grave. Charles a déjà repéré l’intégralité des élites dans le bar. « Tu vois, elle, c’est Lucille, je l’ai sur Instagram (elle finira 3ème)… Lui, c’est Esteban (il finira Champion de France Espoir) ».  Quand on compare nos deux groupes, on remarque bien qui sont les élites.

Nous récupérons nos dossards et glanons une brioche au passage. Ils m’ont par les sentiments, je l’engloutis en une fraction de seconde. Encore un faux-pas…mais c’est bon pour le moral !

Je serai passé à une brioche et une bière du titre de champion de France, c’est ballot hein ?

 

 

Le gîte où nous logeons a beaucoup de charme. Isabelle, la propriétaire, après 30 ans en Bretagne dont 3 sur l’île de Groix, s’est installée ici car elle voulait un endroit « sauvage ». Je la sens bien finir dans « Into the Wild » bientôt.

Allez au lit, il faut être en forme pour la course le lendemain.

Le réveil sonne à 6H00 et je suis le dernier levé. Nous avalons un petit-déjeuner. Ce sera 3 barres de céréales et une compote pour moi. Je veux surtout digérer rapidement et éviter un estomac fragile pendant la course. J’enfile mon traditionnel maillot de bain (dédicace au crossman de Rambouillet qui m’a tant inspiré depuis longtemps), ma casquette « binouze » (ça me donnera de la force de finir plus vite et d’aller la récupérer cette binouze) et le beau maillot du Club.

 

 

 

Le parking est situé à 2 kilomètres en contrebas du départ de la course et nous devons donc attaquer à la fraîche, en guise d’échauffement, un petit sentier en montée avec environ 100 mètres de dénivelé positif.

Sur l’aire de départ, j’assiste, médusé, à un spectacle peu commun. Des athlètes s’échauffent à vingt kilomètres par heure dans les montées, toisent mon accoutrement, se demandent si je suis le clown de l’événement ou si je participe vraiment ; on sent la tension d’un championnat. Néanmoins, fidèles à nous-mêmes, les Foulées gagnent déjà la palme de la convivialité et de la bonne humeur. Nous posons pour les photographes, profitons du paysage somptueux, déconnons… et oublions même de nous échauffer. Cela me sera préjudiciable par la suite…

8H29, le départ va être donné dans une minute et cela pousse sur la ligne. Nous sommes des sardines et j’ai envie de chanter fort « Ah qu’est-ce qu’on est serré sur cette ligne de départ, chantent les coureurs, chantent les coureurs, Ah qu’est-ce qu’on est serré sur cette ligne de départ, chantent les coureurs entre les shorts et les débardeurs… ».

8H30, le coup de pistolet retentit et nous nous élançons. Voici ma course en 3 chapitres. Tenez-vous bien, je compte écrire un livre entier.

 

 

 

 

L’EUPHORIE

 

Le départ est donné et les premiers hectomètres sont en descente. Nous avons toutes et tous peur de nous faire enfermer dès le premier single et nous partons vite, très vite, pour échapper à ça. C’est un vrai départ de Cross. Des chutes devant moi. Yoann essaie de récupérer une malheureuse qui passe à peu de se faire piétiner par une horde de sangliers voulant juste bouffer. Je déroule et c’est plutôt agréable, le routard que je suis y trouve son compte. Si c’est ça un trail,  c’est easy Lizzie (dédicace à Jérôme S.).

Je veux m’accrocher à Yoann le plus longtemps possible. Dès la première montée, mon cardio s’emballe. Ça tape fort dans la poitrine mais heureusement quelques bouchons font ralentir le rythme. Je paye un échauffement en dilettante. Yoann commence à doubler, je le suis. Charles un peu derrière nous fait signe de ne pas l’attendre, il commence à gérer son effort.

Je suis content d’être là, je discute avec Yoann sur les parties plus faciles, tout en déroulant à 14 km/h. Je parle aux bénévoles, leur sourit, les remercie, adresse des messages d’encouragements aux coureurs qui me doublent. « C’est qui celui-là ? Depuis quand on s’encourage lors de Championnats ? … »

Je ne vois pas les kilomètres qui passent. Yoann m’indique que nous avons déjà parcouru 13km et je n’en crois pas mes yeux. C’est facile le Trail. « On est euphorique ! » me lance-t-il le visage serein. Mon objectif de tenir au moins 10km avec Yo est déjà réussi.

Vers le 15ème kilomètre, Yo s’enquiert de mon hydratation et de mon alimentation. Dans l’euphorie, je n’ai rien bu ni avalé alors que cela doit faire plus d’une heure et demie que l’on court. J’espère qu’il n’est pas trop tard.

 

L’EXTINCTION DES FEUX

 

Vers le 16ème kilomètre alors qu’on attaque une descente plutôt roulante, j’ai la sensation de ne plus avoir de jus, que mes jambes deviennent rigides comme des bouts de bois, et que ma vision s’altère. Oh non, c’est l’hypo qui me guette (pas l’hippopotame hein…Quoi qu’au vu des morphologies des traileurs présents sur ces championnats, j’ai effectivement plus l’air d’un hippo que d’une gazelle).

Je bois, commence à avaler une petite compote mais c’est trop tard : extinction des feux. Il faut que je m’arrête deux-trois minutes le temps de reprendre des forces et retrouver un peu de lucidité. J’engloutis mes deux barres de céréales. Je n’ai déjà plus rien à manger. Et je repars sur un petit rythme, je me fais dépasser de tous les côtés. Yoann s’est envolé telle une hirondelle (pas Blandine, elle était malade…) et je ne le reverrai plus avant l’arrivée.

S’en suit quelques kilomètres dans le dur. Je marche quasiment dans toutes les montées et trottine tel « un cheval qui aurait raté une haie » dans les autres parties. Il faut gérer et laisser passer le moment difficile. Admirer les paysages, se servir de la force et la gentillesse des bénévoles, et surtout relativiser cet échec « Ce n’est pas un objectif Jéjé, c’est normal d’être dans le mal … » pense-je. Je retrouverai rapidement mes objectifs et mes distances de cœur dans quelques semaines et cette route qui me plaît tant. « Pouah, ça puir Messire » (pour celles et ceux qui ont la réf’).

 

LE TOURISTE

 

Il reste une dizaine de kilomètres dont les deux plus grosses montées ainsi qu’une bonne descente. J’ai repris un peu de forces mais je ne peux pas aller plus vite. Ma course est déjà un succès, et je veux juste désormais terminer en bon état et me faire plaisir.

Le touriste débarque dans les Causses. Je regrette de ne pas avoir pris mon portable pour immortaliser quelques paysages. Tant pis…J’en prends plein les yeux et garderai tout en mémoire.

Dans l’avant dernière-montée, au franchissement d’une route, alors que je suis en train de parler à un bénévole en avalant de la banane récupérée lors d’un ravitaillement, Charles me rejoint. Il a un bon rythme et me demande de le suivre. « Accroche-toi Jéjé » me lance-t-il. Je me force. Je tiens 6 mètres et demi. Je lui souhaite bonne chance. Il a très bien géré sa course et finit plutôt bien. Il m’impressionne, il a un gros potentiel.

Je profite de la course, des beaux sentiers, des magnifiques paysages, du temps clément. Ma course s’apparente désormais à une belle randonnée. Dans la dernière montée, alors que j’essaye de ranger mon coupe-vent sur le côté, Nicolas me rejoint. « Ça va Jé ? » me demande-t-il. Je suis content de le voir, il va égayer les derniers hectomètres. Il a mal au pied, une tendinite sournoise depuis janvier qui le lance très fort sur cette fin de parcours. Je vois son mental de guerrier en action. Malgré son déhanché et son boitement, il s’accroche. Voilà les vrais traileurs. Des athlètes capables d’aller puiser au maximum dans leurs ressources malgré des douleurs et des blessures récurrentes. Combien d’athlètes ai-je vu cramper pendant la course ?! Mais qui me doublaient par la suite après s’être arrêtés. Impressionnants… Nous sommes désormais au cœur de la Cité de Pierres avec des escaliers bien raides et quelques photographes bien positionnés. Je feins d’être facile, fais coucou au drone l’air de rien. « Ils vont croire que je suis facile haha ». Fantine me confiera après avoir fait la même chose. Nous sommes tous pareils.

 

 

L’arrivée se dévoile enfin et je franchis la ligne bien content. Nicolas arrive juste après et nous retrouvons Charles et Yoann déjà arrivés. Yoann a été monstrueux comme d’habitude. Il est allé au bout de lui-même. Son teint pâle et livide démontre l’intensité de l’effort. Il est arrivé 30 minutes avant moi. Il mettra un peu de temps à s’en remettre. Les crêpes au miel, et une sieste à même le sol lui feront le meilleur effet.

Tous les autres athlètes des Foulées arrivent et nous profitons de notre bière d’après-course pour refaire le Trail. Quel moment intense ! Ces championnats de France étaient une magnifique expérience et j’y retournerai avec plaisir….si je me qualifie ! Merci la Fédé pour cette année…

 

 

 

 

 

 

Un grand bravo à tous les coureurs du Club qui ont participé à ces Championnats. Mentions spéciales à Yoann, 14ème M1M, impressionnant sur ce type d’épreuve et avec qui j'ai adoré courir la première partie, Charles qui a un grand potentiel pour sa première année au Club, et à tous les autres traileurs aguerris, ces forçats des sentiers qui m’ont beaucoup inspiré et appris pendant ce weekend (Fantine, Claire, Lizzie, Stéphane, Franck, Nicolas, Jérôme S., Olivier, Benoît M, Benoît R, Gilles, Eric, Damien).

Je reviendrai !!!

 

PS : Promis Miguel, je serai en forme pour les Ekidens !

 

 

 

 
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