Semi pluvieux, semi heureux

Par Romain Hude

 

Ce matin j’ai un vieux compte à régler avec le semi-marathon.
18 mois que je rumine mon échec sur cette foutue distance (cf récit de Rambouillet) ! J’avais comme souvent promis qu’on ne m’y reprendrait plus, mais le temps a passé et l’orgueil a pointé le bout de son nez en juin dernier : c’était décidé, je ferai une dernière tentative à l’automne !

J’ai donc basé tout mon début de saison sur cet objectif. J’ai commencé en allongeant les footings cet été, j’ai suivi scrupuleusement les plans de Miguel, j’ai été assidu aux séances du jeudi, j’ai même fait un trail de 24km !
Encouragé par les résultats de cette préparation, bonnes séances sur piste, bon chrono sur 10km à Montigny, j’ai poursuivi mes efforts, jusqu’à ce dimanche matin à Boulogne.

Premier constat, il pleut !
Oh, il ne s’agit pas d’une pluie franche et virile, qui annonce la couleur et vous donne une bonne raison pour renoncer,  abandonner ou justifier une piètre performance. Non, c’est une petite pluie fine, insidieuse, faux-cul. Une pluie qui se laisse oublier mais qui, après une vingtaine de minutes, vous a trempé aussi surement qu’une averse tropicale.
Bref, je m’en serais bien passé.

Second constat, il y a foule ! (malgré le premier constat)
Moi qui ai l’habitude des petites courses, avec 500 partants maximum, je suis un peu dépaysé. Certes ce n’est pas le marathon de Paris et ses 40 000 furieux, mais l’organisation annonce tout de même plus de 6000 inscrits. J’ai heureusement pu obtenir une place dans le sas préférentiel (plus ou moins bien respecté par les uns et les autres, comme d’habitude), ce qui me permet de me positionner à 10m de la ligne.

Pan, le départ est donné.
Après quelques centaines de mètres j’aperçois un maillot du club. C’est l’ancien maillot, le blanc. Mais quel est l’abruti qui n’a pas encore adopté le nouveau modèle ! Je le rattrape, hop hop hop, et c’est…  notre président bien sûr ! José m’explique qu’il fait la course au feeling, et qu’il ne me suivra pas sur mon objectif de 1h18. Je continue donc sans lui.
Nous arrivons sur les quais de Seine. L’ambiance est aussi bonne qu’elle peut l’être par un temps si maussade. Il y a des spectateurs, des groupes de musique, et des bénévoles en nombre. Notamment au KM5, où on nous propose des bouteilles d’eau. Ça me fait mal au cœur d’en prendre une pour simplement deux gorgées, mais j’ai décidé de bien m’hydrater pour éviter les crampes. Je préfère ne pas imaginer la vision apocalyptique des cadavres de bouteilles après le passage des 6000 coureurs.

Après le 7èmekilomètre, juste avant de rentrer dans le bois de Boulogne, il y a un passage en épingle où sur 700m dans un sens puis dans l’autre, on croise les coureurs de devant, puis ceux de derrière.
En tête de course, une armada de kenyans, aux cuisses pas plus épaisses que mes avant-bras, sont déjà entrés dans le bois. Un peu plus loin on croise les très bons amateurs. Parmi eux Anis fait belle impression, je l’encourage au passage.
Dans l’autre sens je vois José, puis Charles.
Je vois aussi que le meneur d’allure des 1h25 est juste derrière moi. Un peu inquiet je refais mes calculs mentalement : non, pas de doute, je suis sur le bon tempo. Les gars qui ont décidé de suivre le meneur sans se poser de question risquent d’avoir une petite surprise !

Nous sommes maintenant dans le bois, du côté de l’hippodrome. Preuve que le temps est franchement pourri, il n’y a presque pas de cyclistes, alors que d’habitude c’est le tour de France en permanence par ici.
On vient de passer le 9èmekilo et je commence à avoir des sensations bizarres. En fait ce sont 3 points de côté, rien que ça, qui pointent le bout de leur nez : un au-dessus de la hanche gauche, un au-dessus de la hanche droite et un autre à la clavicule droite. C’est à peine perceptible mais le doute n’est plus permis. J’appuie fort sur ces 3 points pour tuer dans l’œuf ces trublions.
Passage au 10, après une petite côte qui constitue la seule vraie difficulté du parcours. 37’12 à ma montre, c’est un poil trop lent pour les 1h18 mais je ne fais pas la fine bouche.
Pour les points de côté la décision est faite : c’est celui de la hanche gauche qui a gagné. Il s’est franchement déclaré, alors que les deux autres ont disparus. Je prends un petit coup au moral car je ne me vois vraiment pas faire 11km dans cet état.

Heureusement c’est à ce moment que je  rejoins, après l’avoir eu en ligne de mire un long moment, un petit groupe bien organisé. Ça me fait du bien de ne plus courir seul. Je demande des conseils pour mon point de côté : bien souffler, serrer le point… Mais la seule chose qui fonctionne un peu est toujours d’appuyer fort sur la douleur. Je m’y applique donc pendant les 4 kilomètres suivants, à tel point que le soir j’aurai autant de courbatures au bras gauche qu’aux jambes.
Pour agrémenter le tout la pluie s’est mise à tomber bien plus franchement. Le froid me donne des aigreurs d’estomac, et je sens que mes pieds sont dans un sale état, trempés par la pluie et les flaques.
Mais pour le moment je tiens toujours le rythme. Je prends les kilomètres les uns après les autres, sans me poser de question.

 

De retour sur les quais. Je passe le 15èmekilo avec mon groupe, un peu réduit il est vrai. Bon nous ne sommes plus que trois en fait.
Les jambes sont bonnes et le point de côté a baissé la garde. Ouf !

Nous passons au 16èmeen un peu moins d’une heure. C’est bon, je suis toujours dans les clous pour faire autour d’1h19.
Sous le pont de St Cloud il y a une ambiance de folie ! Les spectateurs s’y sont regroupés en nombre pour se protéger de la pluie, leurs cris résonnent dans le tunnel, ça fait un bien fou au moral.
Après le 18èmemes ressources sont franchement entamées et je ne cours plus qu’au mental. Je m’accroche à mes compagnons de route. Je ne regarde plus le chrono, de toute façon je donne tout ce que j’ai, on verra bien. 
Je navigue à vue sur les dernières flaques d’eau du parcours. Je vois l’arche d’arrivée au loin. Petit coup d’œil à ma montre : elle vient juste de passer les 1h18 !
Un dernier petit effort malgré la douleur et je franchis la ligne tout juste sous les 1h19.

Ouf, c’est cool d’être enfin arrivé !

 

Je n’ai plus qu’une envie maintenant : retourner à la voiture pour me changer, car je suis vraiment trempé comme une soupe.

En passant devant le ravitaillement une bénévole m’en propose justement une, de soupe. Je trouve le clin d’œil amusant et je l’accepte. Pas terrible mais ça réchauffe.

 

Voilà, c’était un bien sale temps pour un règlement de compte, mais c’est fait, contrat rempli.

Prochaine cible : les cross.

 

 

 

 

 
Foulée Royale - 9 Juin
Bannière
Bannière
Mécène - Art Dan
Bannière